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Peter Addo: Comment l'AFD utilise les nouvelles technologies pour renforcer la démocratie en Afrique

Dernière mise à jour : 1 mai 2023

Responsable de l'Emerging Tech Lab Agence française de développement (AFD)

Un ouvrage sur l'impact des nouvelles technologies sur la démocratie (en Afrique) a été publié le lundi 20 mars dernier. A travers, l'AFD vous avez fait le choix de donner la parole aux sociétés civiles afin qu'elles puissent faire émerger des propositions concrètes. Pourquoi avoir fait le choix d'une telle démarche ? Comment comptez - vous poursuivre cette dynamique ? Si oui, comment ?

En donnant la parole aux sociétés civiles, nous avons fait le choix de favoriser l'émergence de propositions concrètes. Avec l'explosion de l'avancement technologique, de plus en plus de personnes dans les communautés et la jeunesse utilisent les technologies. Les organisations de la société civile ont un rôle crucial à jouer dans la capture de ces tendances et leur utilisation pour avoir un impact sur la démocratie. Nous savons que les organisations de la société civile sont souvent en première ligne pour identifier les besoins et les problématiques. Elles jouent un rôle crucial dans le développement des pays du Sud en participant activement à la mise en place de solutions durables pour renforcer la démocratie.

Au sein de l'Emerging Tech Lab de l'AFD, un lieu d'innovation et d'expérimentation pour tester de nouvelles approches technologiques au service du développement, nous cherchons à poursuivre cette dynamique d'écoute de la société civile. Nous organisons des conférences Tech Talks chaque mois pour rassembler différents acteurs (chercheurs, entrepreneurs, ONG, etc.) autour de thématiques liées aux technologies émergentes et à leur utilisation dans le contexte du développement. Ces conférences permettent d'échanger sur des projets concrets, des expériences réussies ou des défis à relever, et offrent une occasion d'écouter les besoins et les idées des participants, y compris ceux de la société civile. En outre, l'identification de pistes d'investissement pertinentes pour les communautés locales (l’intelligence terrain) est cruciale pour l'AFD. La société civile joue un rôle clés dans cette démarche en identifiant les partenaires potentiels et les sujets clés pour le développement des technologies émergentes. Grâce à cette collaboration, l'AFD peut maximiser son impact.


Selon vous, comment les nouvelles technologies peuvent permettre de faire émerger des nouvelles forces sociales ? Quels rôles pour les bailleurs internationaux comme l'AFD?


Comme l’ouvrage « Nouvelles technologies et démocratie » rédigé par JMA le met en valeur, les nouvelles technologies jouent un rôle important dans l'émergence de nouvelles forces sociales en permettant une plus grande participation et une plus grande inclusion des individus dans la vie économique, sociale et politique. Par exemple, les méthodes d'intelligence collective telles que le crowdmapping ou encore le crowdsourcing sont en train de transformer la façon dont les citoyens s’engagent dans la résolution de problèmes communs. En permettant à quiconque de participer à la collecte de données, le projet Common Voice de Mozilla s'efforce de créer un ensemble de données vocales plus diversifié, reflétant la variété des langues, des accents et des dialectes parlés dans le monde entier. Cette approche inclusive ne laisse ainsi « no one behind ».

Cependant, pour que les nouvelles technologies puissent contribuer à l'émergence de nouvelles forces sociales, il est essentiel de veiller à ce qu’elles soient accessibles et utilisables par tous, y compris les populations les plus vulnérables et marginalisées. Cela nécessite que les populations soient familières avec l’utilisation de la technologie. Lorsque les citoyens ont une connaissance approfondie des politiques technologiques, cela leur permet d'engager des discussions éclairées sur les impacts de la technologie dans la société. Dans ce contexte, les bailleurs internationaux comme l'AFD ont un rôle clé à jouer en finançant des projets d'innovation technologique qui favorisent l'inclusion sociale, en particulier dans les pays en développement. En favorisant une connaissance approfondie des politiques technologiques et en encourageant les échanges entre les citoyens, l'AFD souhaite contribuer à renforcer la participation démocratique et la prise de décisions éclairées sur le rôle de la technologie dans la société.


Le progrès est souvent source de nouveaux défis et de risques. N’êtes-vous pas inquiet des risques que peuvent engendrer les nouvelles technologies sur la démocratie?


Bien sûr, le progrès technologique est souvent porteur de promesses et d'opportunités pour la société, mais il peut également engendrer de nouveaux défis et risques. Ces risques sont nombreux et peuvent inclure la désinformation, la polarisation, la violation de la vie privée et la cybercriminalité, entre autres. L’une de nos préoccupations majeures concerne l'impact des nouvelles technologies sur la démocratie et les libertés individuelles. L’ouvrage de JMA le met très bien en avant : les nouvelles technologies peuvent être utilisées pour manipuler l'opinion publique ou encore pour renforcer les inégalités et la concentration du pouvoir. Le Tech Brief N°5 cite notamment l'exemple de la campagne présidentielle de 2016 aux États-Unis, marquée par la diffusion de fausses informations sur Hillary Clinton, connue sous le nom de "Pizza gate". Cependant, nous pensons qu'il est possible de minimiser ces risques afin de garantir que les nouvelles technologies sont utilisées de manière responsable et éthique. Nous sommes convaincus que les gouvernements, les entreprises et la société civile doivent travailler ensemble pour protéger la démocratie, les droits et libertés des citoyens, tout en favorisant l'innovation et le progrès technologique.


Par conséquent, comment utiliser rationnellement ces nouveaux outils pour avoir une démocratie plus ouverte ?


Nous pensons qu’il est important de mettre en place des stratégies et des mécanismes appropriés qui permettent de maximiser les avantages de ces outils tout en minimisant les risques.

D’une part, pour atteindre cet objectif, l’alphabétisation numérique (« digital literacy ») joue un rôle crucial dans l'utilisation rationnelle des nouvelles technologies pour promouvoir une démocratie plus ouverte. Il est important de s'assurer que les citoyens ont une compréhension solide des technologies qu'ils utilisent, de leurs avantages et de leurs risques, afin de pouvoir évaluer de manière critique l'information qu'ils reçoivent et de participer de manière éclairée aux débats publics, permettant une participation active des citoyens à la vie démocratique.

D’autre part, nous sommes convaincus que la formation de jeunes talents dans le domaine des politiques technologiques (« Tech Policy Talents ») peut contribuer à créer un environnement où les nouvelles technologies sont utilisées de manière responsable et éthique afin de renforcer les valeurs démocratiques. Il est important d’embarquer la jeunesse dans cette transition, en particulier dans les pays du continent africain, qui concentrent la plus grande population jeune du monde. Nous souhaitons ainsi leur fournir les compétences nécessaires pour comprendre les implications sociales et politiques des nouvelles technologies et pour élaborer des politiques efficaces en la matière, qui contribueront à garantir les droits et libertés fondamentaux des citoyens.


Merci Peter Addo

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